C’est la journée dédiée à Noël LEE qui aurait eu 100 ans ce Noël 2024. Avec son ami Alexandre Tharaud nous avons voulu lui rendre hommage. Alexandre a séléctionné des titres dans sa discographie que nous vous proposons dans ce coffret digital qui vient de paraître.

Noël LEE, le Centenaire

Noël Lee, l’homme-musique

            L’immense aventure discographique de Noël Lee prend son envol au début des années Cinquante, pour ne jamais sembler s’arrêter. Une vie traversée d’enregistrements, faisant pour beaucoup figures de référence. Accueilli à bras ouvert par le label Arion, dès 1976, Noël Lee ne cessât de fréquenter les studios pour ce label, jusqu’en 2013. Musique de chambre en priorité, avec ses amis les plus chers, Christian Ivaldi, Jeff Cohen, Gérard Poulet, Michel Debost, Kurt Redel, Udo Reinemann, Bernard Kruysen, Anna-Maria Miranda ou Martine Mahé, pour une discographie soignée, réfléchie, singulièrement engagée. Il avait gravé le grand répertoire soliste – sonates de Schubert, intégrales Debussy et Ravel –, le temps était ensuite venu de défendre les répertoires rares, telles les études de Moshelès, les quatre-mains de Dvorak et les mélodies de Massenet.

            Il importait peu à Noël de se montrer. Indifférent aux éloges comme aux critiques, seul le travail acharné et la pratique de la musique le guidaient. Levé chaque jour au petit matin, il composait, puis travaillait ardemment ses compositeurs de chevet, Poulenc, Ravel et Debussy en tête, sur l’un des deux Steinway qui envahissaient son salon du XVIIème arrondissement de Paris. Tout l’appartement semblait d’ailleurs submergé de musique. Des partitions par centaines entouraient les deux fauves, les programmes des saisons de concerts parisiens accumulés près du téléphone, vinyles et cds emplissaient les étagères. Les dessins d’artistes américains, tel Kelly, recouvraient les murs, au côtés de photos de ses amis, ici et là. La présence encore prégnante du grand amour de sa vie semblait réunir cette multitude d’objets en une totale cohérence. Entrer chez Noël, c’était entrer dans un monde d’exigence et de douceur.

            Exigeant, il l’était. Envers ses élèves, ses amis, et avec lui-même. Un tempo mal assuré, une erreur de style, un rendez-vous en retard déclenchaient sa colère. Elle ne durait jamais longtemps, quelques minutes à peine. Noël était un homme de coeur et nous le disait. Sa bienveillance absolue et un délicieux accent américain faisaient fondre tous ses amis, lesquels voyaient en lui le plus adorable des hommes.

            Il y a tout de cela dans le jeu de Noël Lee. Un oeil bienveillant sur le monde, une vigilance extrême et une discipline de fer. Les prises de son typiques des années quatre-vingt et quatre-vingt dix, intimes et sans apprêt, donnent à ces enregistrements de l’époque Arion un parfum d’authenticité. Un univers sonore proche de celui de son appartement, lorsque nous l’écoutions, confortablement installés dans l’un de ses fauteuils bas, de velours bleu, entourés de dessins, partitions, de livres, de photos, mille et uns témoins de sa vie… Une vie en musique.

            Alexandre Tharaud

            25 décembre 2024